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Le massacre des Innocents…Utoya, quatre ans…

Le massacre des Innocents

" Le 22 juillet sera toujours le jour de mon anniversaire et celui où des vies ont été prises à Utoya. On n’honore pas les morts avec de la tristesse, on les honore en aimant et en donnant du sens à sa propre vie."

Kjetil Lindstrom

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Texte écrit il y a quatre ans, après la fusillade de Norvège

http://archives-lepost.huffingtonpost.fr/article/2011/07/23/2554901_le-massacre-des-innocents.html

Bon, je sais pas vous. Moi, j’ai dormi deux heures, d’un sommeil agité et confus.

Bien sûr, la Somalie, tout ça. Et puis chaque catastrophe est atroce, les souffrances ne sont pas quantifiables, entre un crash aérien, un accident, un enlèvements avec démembrement – une nouvelle spécialité hexagonale…

Mais quand même, l’idée de tous ces gamins confrontés à un mixt de Scream et d’Elefant, alors qu’ils étaient juste venus se colleter à des idées en faisant griller des chamallows en bord de fjord, ça me terrifie.

Les chaînes d’info françaises, au réveil, étaient déjà sur le Tour et les bouchons. Par contre, que ce soit Sky, CNN ou les chaînes allemandes, le reste du monde, lui, racontait.

Racontait le calme méthodique d’un seul homme sur cette île d’Utoya, sa façon d’avoir amadoué les adolescents - car il s’agit d’enfants, d’ados, entre 16 et 22 ans…- puis de les avoir alignés en cercles, et abattus froidement, avant de commencer à les chasser, oui, chasser comme du gibier ; ils ont couru, vers les bosquets, les rochers, certains ont tenté de grimper sur des arbres, d’autres sont partis à la nage.

Mais il en a « eu » plus de 80…Vous imaginez ? Les images sont terribles, on distingue ce matin quelques canots, des tentes abandonnées, des couvertures de survie.

Et tout ça pour assassiner le cœur même de la démocratie.

On parlera peut-être de folie, mais il semblerait que cet homme soit proche des « milieux d’extrême-droite » et qu’il ait voulu, en massacrant ces innocents, faire un exemple. S’attaquer à la liberté d’esprit de son pays. A son pacifisme. A cette Norvège emblématique du Nobel de la Paix.

Je crains fort qu’il ne fasse des émules, et qu’ailleurs dans le monde d’autres illuminés ne se rendent compte combien il est facile de faire sauter un quartier ou de déboulonner toute une colonie.

Car je pense aussi à cette secrétaire d’Oslo, que j’imagine autour de la trentaine, elle venait de poser ses congés, et elle bouclait ses dossiers au ministère, avant de partir avec ses petits-enfants vers l’Atlantique…Ou à ce jeune parlementaire, qui ne votera plus jamais…L’attentat contre le ministère est épouvantable aussi, par son impact énorme, par sa puissance d’action.

Mais l’abjection, je la ressens surtout dans cette attaque physique et déterminée envers ces jeunes gens plein de fraîcheur et d’idéal, de projets et de joies, qui s’étaient rassemblés dans l’allégresse et la réflexion, dans l’envie de faire bouger les choses, de participer à la marche démocratique de leur temps. (Et je me demande si, en France, nous arriverions à ce chiffre de 700 participants pour un seul parti, quand je repense à mes propres élèves, si peu concernés par le Printemps arabe ou par Fukushima…)

De Beslan aux écoles de Rio, les Booling for Columbine du réel sont légion, mais cette fusillade-là dépasse, par son ampleur et sa préparation, toutes les autres, et confine à ce que nous pensions avoir dépassé depuis la fin du national-socialisme… On peut prononcer le terme d’extermination.

Car cet homme a voulu exterminer, éradiquer, débarrasser un pays de sa jeunesse, de son avenir démocratique. Et il convient de se demander comment de telles idées parviennent, au cœur même de l’Europe, dans un pays où la tolérance est de mise, à faire leur chemin.

Avant qu’il ne soit trop tard, il me paraît urgent de nous retrousser les manches ensemble et sérieusement, d’éclairer, de rassembler, d’éduquer, avant que la violence n’envahisse nos quotidiens de petits Européens tranquilles…Car tout est lié dans notre monde qui paraît devenir fou, des attentats aveugles sur les marchés aux déséquilibrés qui enlèvent et assassinent à qui mieux mieux, de ces images de violence qui tournent en boucle sur le net aux séries TV faisant une sourde apologie du crime et de l’immonde…De tels événements, mélangeant en quelques heures des images cinématographiques de films d’horreur et celles que l’Europe ne pensait connaître que par les médias, placent soudain nos démocraties au cœur même d’un marché de Bagdad et d’un film à sensation: l’enfer est à nos portes.

Il semblerait que l’Homme, à l’ère où il est enfin devenu capable du meilleur, puisque nous savons soigner, prévenir, guérir, communiquer…, retombe inéluctablement dans le pire, dans l’absurde, dans l’abject.

Je forme pourtant naïvement le vœu que ces jeunes Norvégiens ne soient pas morts pour rien.

Je forme le vœu que dans toute l’Europe, dans le monde entier, des gens se mettent ensemble pour parler, réfléchir, éduquer, éclairer.

Je forme le vœu que ces jeunes ne soient jamais oubliés, que des partis politiques, des rues et des places portent leurs noms, leurs prénoms, que dans un siècle on sache que c’est à partir du 22 juillet 2011 que le monde aura changé, que les hommes se seront mis ensemble pour avancer et pour s’aimer.

"Je porte mes blessures avec dignité, parce que je les ai reçues debout, pour quelque chose en quoi je crois, pour la Norvège. "

Ylva Schwenke

« Amis bien-aimés,

Ma Loulou est partie pour le pays de l'envers du décor, un homme lui a donné neuf coups de poignard dans sa peau douée. C'est la société qui est malade, il nous faut la remettre d'aplomb et d'équerre par l'amour et l'amitié et la persuasion.

Sans vous commander, je vous demande d'aimer plus que jamais ceux qui vous sont proches ; le monde est une triste boutique, les cœurs purs doivent se mettre ensemble pour l'embellir, il faut reboiser l'âme humaine.

Je suis maintenant très loin au fond du panier des tristesses. On doit manger chacun, dit-on, un sac de charbon pour aller en paradis. Ah ! Comme j'aimerais qu'il y ait un paradis, comme ce serait doux les retrouvailles.

En attendant, à vous autres, mes amis de l'ici-bas, face à ce qui m'arrive, je prends la liberté, moi qui ne suis qu'un histrion, qu'un batteur de planches, qu'un comédien qui fait du rêve avec du vent, je prends la liberté de vous écrire pour vous dire ce à quoi je pense aujourd'hui : je pense de toutes mes forces qu'il faut s'aimer à tort et à travers. »

Julos Beaucarne, après la mort de sa femme.

Lisez les récits...
http://abonnes.lemonde.fr/m-actu/article/2015/07/22/il-y-a-quatre-ans-le-massacre-d-utoya_4693630_4497186.html#liste_reactions

 

Sabine Aussenac.

 

 


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